Cloîtrée ainsi dans la maison paternelle, la bourgeoise attend longtemps un épouseur qui n'arrive pas. S'il y a plusieurs soeurs, la dot médiocre ne tente aucun, et toute sa félicité se borne à se requinquer le dimanche, à mettre la belle robe et à se promener en famille au jardin des Tuileries.
La grisette est plus heureuse dans sa pauvreté que la fille du bourgeois : elle se licencie dans l'âge où ses charmes ont encore de l'éclat ; son indigence lui donne une pleine liberté, et son bonheur vient quelquefois de n'avoir pas eu de dot. Elle ne voit dans le mariage avec un artisan de son état qu'assujettissement, peine et misère ; elle prend de bonne heure un esprit d'indépendance. Aux premiers besoins de la vie se joint celui de la parure : la vanité, non moins mauvaise conseillère que la misère, lui répète tout bas d'ajouter la ressource de sa jeunesse et de sa figure à celle de son aiguille. Quelle vertu résisterait à cette double tentation ? Ainsi la grisette devient libre ; à l'abri d'un métier, elle suit ses caprices, et ne tarde pas à rencontrer dans le monde un ami qui s'attache à elle et l'entretient. Quelques-unes ont joué un rôle brillant, quoique passager : les plus sages économisent et se marient quand elles sont sur leur retour.