Louis Sébastien Mercier,
Les tableaux de Paris
Les Savoyards
Il est bien cruel de voir un pauvre enfant de huit ans, les yeux bandés
et la tête couverte d'un sac, monter des genoux et du dos dans une
cheminée étroite et haute de cinquante pieds ; ne pouvoir
respirer qu'au sommet périlleux, redescendre comme il est monté,
au risque de se rompre le cou, pour peu que la vétusté du
plâtre forme un vide sous son frêle point d'appui ; et la bouche
remplie de suie, étouffant presque, les paupières chargées,
vous demander cinq sous pour prix de son danger et de ses peines. C'est
ainsi que se ramonent toutes les cheminées de Paris ; et des régisseurs
n'ont enrégimenté ces petits malheureux que pour gagner encore
sur leur médiocre salaire. Puissent ces ineptes et barbares entrepreneurs
se ruiner de fond en comble, ainsi que tous ceux qui ont sollicité
des privilèges exclusifs !
dernière modif : 04 Apr. 2001, /francais/savoyf.html