Couverture


Marat, l'Ami du Peuple


Chapitre I


PRÉFACE

Jusqu'à trente ans, j'ai jugé Marat sur ce qu'on en disait autour de moi, sur ce que j'avais lu dans les historiens modernes : je le maudissais, je le conspuais, je le reniais. Vint l'expérience qui m'apprit (trop tard, hélas !) quel cas on doit faire de l'opinion des gens du monde et des jugements de l'histoire : la voix de la foule n'est guère qu'un echo ; les assertions des écrivains sont le plus souvent entachées d'ignorance ou de sottise ou de fantaisie, quand elles ne sont pas dictées par la mauvaise foi à la solde des partis. N'avais-je pas, d'ailleurs, dans la société, rencontrés de ces parias que chacun repousse avec dégoût, dont on s'éloigne avec effroi, et dont le plus grand crime est d'avoir été méconnus ! L'Ami du peuple fut un de ces malheureux ; je l'ai méprisé, je l'ai accusé, parce que tout le monde le méprisait, l'accusait.

Je me suis demandé, un jour, ce que Marat avait écrit, dit ou fait ; je ne savais de tout cela que ce que m'en avaient répété des gens aussi peu instruit que moi, ou intéressés à me tromper. Honteux de moi-même, je résolus, puisque l'Ami du peuple fut écrivain politique, d'étudier les trente volumes qu'il a laissés, de peser ses principes ; puisqu'il fut fonctionnaire public, de comparer ses actes avec sa doctrine. Dépouillement achevé des pièces de conviction, j'ai reconnu que j'avais été injuste, illogique et lâche d'avoir accusé, condamné, calomnié sur des allégations sans fondements.

Que celui qui a commencé comme j'ai fait lise ce livre, et, s'il ne croit pas à la fidélité des citations de l'auteur, à la justesse de ses déductions, à la loyauté de sa conscience, qu'il cherche au moins dans notre ouvrage l'indication précise où puiser une conviction basée sur des preuves écrites, seule digne d'un homme qui se respecte !



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Marat, l'Ami du Peuple


Chapitre I


dernière modif : 19 Apr. 2001, /francais/bougeart/preface.html