Chapitre XLVI


Marat, l'Ami du Peuple


Chapitre XLVIII


CHAPITRE XLVII.

DÉPANTHÉONISATION

1795.

SOMMAIRE. - Premiers mouvements antimaratistes. - L'Assemblée maintient son décret. - Elle s'enhardit à la réaction. - Troubles au théâtre Feydeau, - dans les rues. - Égout du faubourg Montmartre. - Comparaison singulière entre Marat et Jésus-Christ. - Troubles au Faubourg Saint-Antoine. - Le 8 février 1795 la Convention entend les députés Matthieu et Dumont. - Chiffres exacts des condamnés par le tribunal révolutionnaire. - L'Assemblée rapporte le décret qui décernait le Panthéon aux grands citoyens. - Députations des sections que Marat avait antérieurement stigmatisées. - Pièces officielles.

Un nouveau journal qui venait de paraître sous le titre d'Ami du Peuple, et dont Chales rédigea les seize premiers numéros, écrivait en septembre 1794, à propos de la fête qui allait avoir lieu en l'honneur de Marat : « Mirabeau va donc enfin sortir du Panthéon et Marat y entrer !... Mais admirez le moment qu'on choisit, et l'étrange contradiction dans laquelle on nous jette. Marat obtient les honneurs de l'apothéose, et le maratisme est en exécration ! Mirabeau est proscrit et la contre-révolution s'organise ! Ne serait-on pas tenté de croire que tout ceci n'est qu'une dérision ? Marat triomphant et déifié, et les patriotes ses disciples, connus sous le nom de maratistes, bafoués, honnis, persécutés ! Mirabeau exhumé, dépantheonisé, et tous les ennemis du peuple dont il était le champion et l'orateur, radieux et tout-puissants !... Il me semble que l'ombre de Marat doit s'indigner de l'honneur qu'on lui rend, et celle de Mirabeau se réjouir de l'exécution posthume de ses projets plébiscides... » Et le rédacteur terminait ainsi : « Que son apothéose ne nous jette pas dans une fausse et imprudente sécurité. Ce n'est pas tant aux restes inanimés [327] de Marat que nous devons des hommages qu'à sa doctrine. » Chales ne s'était pas trompé, la panthéonisation n'était qu'une comédie dont le dernier acte allait bientôt être représenté. Moins de cinq mois après que les restes de l'Ami du peuple avaient été déposés dans le temple, la même Assemblée en décrétait le rejet et cela, non pas le front haut, la voix forte, comme il arrive quand parle la conviction, mais la tête basse et en prenant des détours ; nous allons la suivre.

En janvier 95, le bruit courait sourdement que la Convention devait prendre ladite mesure ; c'était un ballon d'essai pour tâter le courant des idées. Le 17, le député Clausel disait à l'Assemblée : « Je dois vous faire part que les terroristes se proposent d'insulter, ce soir, au théâtre, les bustes de Marat et de Lepelletier. Mais les hommes de sang ont beau faire, ils sont surveillés, ils ne parviendront pas à détruire le règne de la justice, en attribuant à ceux qui en sont les plus fermes défenseurs les atrocités dont ils se rendent coupables. » N'est-il pas remarquable qu'au nom de la justice, ce soit justement Marat qu'on oppose à la terreur royaliste ? C'est que l'Assemblée ne veut pas avoir l'air de prendre l'initiative, il en coûte toujours de se déjuger ; elle veut avoir la main forcée : les fausses vertus veulent être violées. Cela ne tardera pas. Vers la fin du même mois, Laignelot, au nom du comité de sûreté générale, mais timidement, les yeux baissés : « Je viens vous rendre compte de ce qui s'est passé hier au spectacle de la rue Feydeau. Une foule de jeunes gens, égarés probablement par des gens qui ne peuvent être que des royalistes ou des terroristes, ont abattu le buste de Marat. Le comité de sûreté générale, qui a les mêmes principes que la Convention, a vu dans Marat un représentant du peuple dont la mémoire a été solennisée, et par conséquent un attentat contre la nation. (On murmure dans la plus grande partie de la salle.) Jusqu'à ce que le temps ait prononcé, le décret doit être respecté. L'image [328] sera redressée ; et le comité n'a pas renversé les Jacobins pour voir s'élever l'anarchie à côté. »

Comme la voix s'est affaiblie ! Ce n'est plus qu'une question de temps. Quand on en est là, le temps va vite.

Le député Laurence : « Laissez l'opinion publique juger des hommes que, dans un moment d'enthousiasme, on a crus grands. » Nous avons vu que l'on avait mis quinze mois avant de se décider à décerner à Marat les honneurs du Panthéon, et l'on se plaint aujourd'hui que le décret ait été porté d'enthousiasme ! On pouvait exiger plus de bonne foi. Mais il fallait faire un pas de plus ; le voilà fait ; la Convention pour un moment prudemment s'arrêta ; elle passe à l'ordre du jour.

Le lendemain, pour donner encouragement à ses maîtres, le Moniteur écrivait avec complaisance qu'on avait relevé le buste, mais qu'un spectateur, placé sur un balcon voisin, avait escaladé la loge, renversé le nouveau plâtre de la console qui lui servait de piédestal, et qu'il l'avait remplacé par celui de Jean-Jacques Rousseau aux grands applaudissements des spectateurs. Le héros d'un acte aussi énergique, dans l'exaltation de son enthousiasme, avait improvisé le quatrain suivant :

Des lauriers de Marat il n'est point une feuille
Qui ne retrace un crime à l'oeil épouvanté ;
Mais ceux que le sensible et bon Rousseau recueille
Lui sont dus par la France et par l'humanité.

Renverser l'image de Marat pour y substituer celle de Rousseau ; rejeter l'application et rappeler le principe, c'était peu intelligent, penserez-vous peut-être. Gardez-vous de croire que ce soit inintelligence, c'était tactique : la réaction royaliste de 1795 avait habilement combiné que c'est degré à degré qu'on ramène le peuple à la servitude. Le fait d'ailleurs n'était pas isolé ; le même soir, la scène s'était répétée dans tous les théâtres. [329]

A partir de ce moment les thermidoriens n'y mirent plus tant de mesure, on avait deviné l'adhésion secrète des autorités. Alors ce fut à qui enchérirait. On vit, dans les rues, des enfants promener triomphalement le buste, ou je ne sais quel mannequin grotesquement affublé, le barbouiller de sang, le souiller de toute espèce d'outrages, le brûler sur la place publique, aux applaudissements frénétiques de la jeunesse dorée, et finalement précipiter les cendres dans un égout de la rue Montmartre, en criant : Marat, voilà ton Panthéon ! Et le Moniteur lâchant son coup de pied : « Les citoyens du faubourg consacraient par leurs applaudissements cette exécution burlesque du jugement de flétrissure depuis longtemps porté par la raison publique. » (5 février 1795.) Quelques modernes ont amplifié sur ce texte, et ont affirmé que le corps de l'Ami du peuple avait été jeté dans le réceptacle d'immondices. Alors coururent dans Paris les vers suivants :


Appui de l'assassin, opprobre de la France,
J'ai plongé le poignard au sein de l'innocence,
Dans les plus grands forfaits je me suis fait un nom.
Passant, les Jacobins m'ont mis au Panthéon.

Les Jacobins ! Et Marat fut panthéonisé après thermidor !

Ailleurs, à la porte d'un droguiste, on voyait pendre l'effigie. On fit aussi force anagrammes ; dans Jean-Paul Marat, l'Ami du peuple, un bel esprit trouva : Va, animal maudit par le peuple. Et toujours le Moniteur : « Croyons que cette manifestation éclatante de l'opinion nationale ne contribuera pas peu au succès de la paix. »

Vinrent encore les accusations les plus incroyables ; c'est dans ce bourbier que les historiens ont puisé leurs argumentations antimaratistes. Un sieur Henriquez, par exemple, prétendit prouver dans une brochure que l'Ami du peuple n'avait jamais été qu'un royaliste. N'est-ce pas le cas de [330] dire avec Chateaubriand : « Les malheureux vivent de leurs plaies. »

La contre-révolution n'hésita pas même à jouer le rôle d'incrédule, quitte à reprendre plus tard celui de croyante : la fin justifie les moyens, avaient dit les bons Pères. On lisait donc dans une autre brochure intitulée : Comparaison singulière de Marat avec Jesus-Christ :

« Si les prétendus anges du paradis firent les honneurs de la crèche de Bethléem, d'un autre côté les Furies entourèrent le berceau de Marat.

« Jésus quitte ses parents pour aller en Calabre ; ainsi fait Marat.

« La boutique aux miracles fut ouverte, sans faire distribuer les billets sur les quais, par Jésus ; ainsi fit Marat.

« Jésus fit son journal parabolique ; Marat fit l'Ami du Peuple.

« Jésus eut des disciples despotisant l'espèce humaine ; Marat, partisan de gouvernement monarchique, aurait dit : Sire, nous donnons à votre gracieuse Majesté le pouvoir de prendre nos femmes, nos enfants, nos biens et nos vies, et de nous faire empaler selon votre bon plaisir et votre adorable caprice.

« Si Jésus eut des apôtres, Marat eut Carrier, Robespierre, Couthon et Saint-Just. »

Enfin, pour dernier rapprochement : « Jésus n'aimait pas le sang ; Marat l'aimait. »

Qu'on nous pardonne ces citations, nous ne les faisons que pour éviter le reproche d'avoir exclusivement reproduit les éloges.

Tout cela préparait le décret de l'Assemblée, mais ne le motivait pas assez légalement ; l'à-propos ne tarda pas à se présenter. On apprit que dans le faubourg Saint-Antoine des femmes avinées s'étaient promenées par bandes en criant : « Vive Marat ! Vive la guillotine ! A bas la Convention ! » Cette fois il était bien évident que l'ordre avait été troublé, les [331] législateurs pouvaient donc frapper en conscience ; et comment frapper plus sûrement, qu'en remontant à celui qui était l'objet même du trouble ?

Le 8 février 1795, le député Matthieu monte à la tribune au nom du comité de sûreté générale : « Je ne vous entretiendrai pas, dit-il, de la conduite de quelques jeunes gens dans un théâtre ; le comité a trouvé plus de légèreté que de mauvaise intention dans la manière d'agir de la plupart d'entre eux. » Comme en quelques jours il s'est adouci ! « Mais il y a des mouvements plus dangereux : dans les places publiques, on a osé redemander la Terreur ; dans des rassemblements secrets, des hommes, des femmes même calomniaient la justice, insultaient par leurs voeux l'humanité, outrageaient la liberté et la morale par leurs espérances. La Convention était, disait-on, le sénat de Coblentz ; on a demandé un massacre général qu'on appelait épuration. On a porté le buste de Marat en triomphe. Frappé de déchéance sur le théâtre, ce buste retrouvait une couronne dans un club.

« Tandis que les uns regardaient comme un emprunt sur l'admiration publique le décret qui place les restes de cet homme au Panthéon, les autres le regardent comme un acte de justice en faveur du martyr de la liberté.

« Au milieu de ces divisons, votre comité n'a vu que le décret qui place Marat au Panthéon ; mais ne connaissant aucune loi qui ordonne de placer son effigie dans les spectacles, elle a donné l'ordre de déplacer son buste. »

Bruyants applaudissements.

ANDRÉ DUMONT. « Enfin il est venu le moment où la vérité tout entière doit dissiper les nuages de l'imposture. L'heureuse révolution de thermidor a dilaté tous les coeurs ; le règne de l'humanité a succédé à une odieuse tyrannie. » (Ici l'auteur fait le tableau de la Terreur.) Pendant qu'il peint à large brosse, donnons, une fois pour toutes, la statistique exacte des condamnations depuis la première érection du Tribunal révolutionnaire jusqu'à la mort de Carrier. Elle est [332] contenue dans les onze numéros qui composent la Liste générale et très-exacte des noms, âges, qualités et demeures de tous les conspirateurs qui ont été condamnés à mort par le Tribunal révolutionnaire, établi à Paris par la loi du 17 août 1792, et par le second Tribunal établi à Paris par la loi du 10 mars 1793. C'est une sorte de journal publié par le tribunal ou sous son patronage ; Deschiens n'en fait pas mention. On va voir dans quels rapports Marat, Robespierre et les Thermidoriens ont contribué aux coupes réglées de la Terreur ; ces chiffres seront aussi éloquents que l'amplification de l'orateur du règne de l'humanité.

Du 17 août 92 au 17 juillet 93, jour de l'exécution de Charlotte de Corday, dans l'espace de onze mois : soixante-quatre décapités. Voilà pour Marat. (Voir p. 284.)

Du 17 juillet 93 au 28 juillet 94, jour de l'exécution de Maximilien, dans l'espace de onze mois et onze jours : deux mille cinq cent soixante-douze décapités. Voilà pour Robespierre. Du 28 juillet 94 (10 thermidor) au 7 décembre de la même année, jour de l'exécution de Carrier, moment du rappel des soixante-treize députés de la Gironde, espace de quatre mois et neuf jours : cent cinquante-deux décapités. On sait que le Tribunal ne fut supprimé que le 31 mai 95 ; nous n'avons pas sous les yeux le reste de la liste, nous le laissons au profit de l'humanité des Girondins comparée à la cruauté de Marat.

Reprenons le discours d'André Dumont, le défenseur de l'humanité : « Cependant, ayons le courage de le dire, les nouveaux efforts des tyrans appellent la vengeance nationale, de nouveaux complots s'ourdissent. Qu'étaient ces Jacobins du 9 thermidor ? Des révoltés. Que sont-ils aujourd'hui ? Des provocateurs à la révolte. Qu'avons-nous à craindre ? Le poignard sur lequel on a juré notre mort. Eh bien, opposons à cette arme du crime le courage de la vertu. Ne laissons pas plus longtemps impunis ces buveurs de sang. Ils fondent leur espoir sur des ombres de mort. Faisons disparaître ces ombres inutiles. Laissons à la postérité à les juger. » [333]

A cet appel énergique, Matthieu, ému, reprend la parole et déclare qu'il va s'armer du courage de la vertu pour combattre ces ombres inutiles ; et il termine : « Je ne crois pas pouvoir trouver une occasion plus favorable de vous présenter au nom des trois comités de salut public, de sûreté générale et de législation, le projet de décrets, suivant qu'ils ont été arrêtés dans l'avant-derniere réunion : « Les honneurs du Panthéon ne pourront être décernés à aucun citoyen et son buste placé dans la Convention nationale et les lieux publics que dix ans après sa mort. »

La proposition fut adoptée, le courageux Matthieu avait, en effet, vaincu des ombres ; ombre de Marat assassiné, ombre de Robespierre guillotiné, ombres des Jacobins dissous.

Ainsi, remarquons-le bien, dans le rapport du décret de dépanthéonisation, pas un mot de Marat ; on adopte une mesure générale pour l'y comprendre timidement, sournoisement. Mais s'il a commis, en effet, tant de crimes réels, c'est le moment de les dévoiler, d'appeler en témoignage les victimes ou parents de victimes ; de dénoncer les actes, comme il a fait lui-même à l'égard de Mirabeau, afin que la postérité puisse juger votre justice. Mais vous n'osez pas même prononcer son nom ! Ce n'est pas là sans doute un décret de réprobation, car Lepelletier, Dampierre et tant d'autres seraient également flétris, et lel n'est pas le sens des considérants. Si ce n'est pas un décret de flétrissure, pourquoi donc laissez-vous outrager sa mémoire, brûler ici, pendre là son effigie ? Avouez donc que vous ne voulez pas paraître vous venger de l'Ami du peuple, parce que sans doute les motifs vous manquent ; parce que vous n'avez plus besoin des motifs puisque vous avez, il y a deux mois, assuré votre majorité par le rappel des soixante-treize. Avouez encore que l'Ami du peuple s'y était pris autrement, et plus loyalement. Déclarer, à quelques jours de date, que ce sont les terroristes qui veulent renverser le buste de Marat, et presque [334] immédiatement que les terroristes sont inspirés par Marat, c'est par trop pitoyable. Puls assimiler l'Ami du peuple à Maximilien ! Maximilien sous le règne duquel Marat est resté dans sa tombe du jardin des Cordeliers ; Robespierre, qui n'avait pas eu une parole de sympathie pour un collègue assassiné, pour sa veuve laissée dans la misère ! Voilà ce que Dumont appelait une occasion favorable, ce qui signifie sans doute que toute circonstance est bonne pour tuer un ennemi. L'histoire jugea cet acte d'un mot, elle dira : Marat fut dépanthéonisé, mais par la Convention de 1795 ; et la date expliquera le fait.

Le rédacteur en chef des turpitudes gouvernementales terminait en ces termes la description des dernières scènes de la parade : « Ce décret a produit dans Paris la plus douce sensation ; il a soulagé le coeur des bons citoyens qui gémissaient de rencontrer dans les lieux publics le buste de celui qui demanda trois cent mille têtes, et de voir ses restes au Panthéon entre les mausolées de Voltaire, qui ne cessa de prêcher la tolérance, et de Rousseau, cet ardent ami de l'humanité. Dès hier on commença à abattre la pagode élevée à ce mauvais génie sur la place du Carrousel, en face du palais où siège la représentation nationale. Une foule de citoyens environne les ouvriers et s'empresse de les aider dans ce travail. Avant-hier, dans la matinée, malgré les efforts terroristes, le buste avait été renversé à la Halle. Un boucher le couvrit d'abord de sang pour montrer Marat dans l'attribut qui lui convenait. La section Marat a changé de nom, elle reprend celui de section du Theâtre-Français. » (Moniteur, 23 pluviôse an II.)

Enfin, répétition des scènes renouvelées dans toutes les circonstances semblables, quel que soit le parti qui triomphe : c'est ce que les journaux appellent faire parler l'opinion publique. Les députations des sections se présentent en foule ; celle du Mont-Blanc : « Citoyens, jugez vos collègues accusés, vengez promptement le peuple ; » celle de la Fraternité : « le buste de Marat blessait la vue des vrais républicains ; nous [335] n'avons vu dans le prétendu Ami du peuple que l'évangéliste de l'anarchie, l'apôtre du pillage et du meurtre, le principal provocateur des 2 et 3 septembre ; et, d'un consentement unanime, le buste a été brisé ; » celle de la Butte-des-Moulins (remarquons bien le nom des sections et rappelons-nous de celles que Marat avait flétries) : « Les scélérats s'étaient emparés d'un mort, ils l'avaient déifié, lui avaient dressé des autels ; votre décret a confirmé un principe sagement établi ; » celle de Bonne-Nouvelle : « Votre décret raffermit le Panthéon ; » puis d'autres, d'autres encore. Nous devions les laisser parler, car elles prouvaient que c'était bien contre Marat que le décret avait été porté ; et de plus ces éternelles turlupinades apprennent au peuple à ne plus jouer à ces comédies dont en 93 comme en 95, comme toujours, on ne lui permettait ou donnait l'amusement que pour mieux le tromper.

Pour couper court à tout ce qu'on a imaginé sur la destinée des restes de Marat, nous allons transcrire deux pièces authentiques extraites des archives de la police.

Lettre adressé le 7 ventôse an III par Guinguéné, président de la Commission exécutive de l'instruction publique, au citoyen Soufflot, inspecteur général du Panthéon :

« Citoyen,

« La famille de feu Marat ne s'étant pas présentée pour enlever son corps du Panthéon, ainsi que l'a fait la famille Lepelletier, aux termes de la loi du 20 pluviôse dernier, nous vous invitons et autorisons, comme inspecteur du Panthéon, à donner les ordres nécessaires pour que la loi ait la plus prompte exécution, et que le corps de feu Marat soit inhumé dans le cimetière le plus voisin.

« Salut et fraternité.

« Signe : GUINGUÉNÉ. »

Procès-verbal dressé le 8 ventôse par le citoyen Parot, commissaire civil de la section du Panthéon, assisté de son [336] greffier, le sieur Desgranges : « Nous, Michel Parot, commissaire civil de la section du Panthéon français, etc., nous sommes transporté au monument du Panthéon et en avons fait extraire les restes de Marat renfermés dans un cercueil de plomb couvert d'une caisse en bois, en présence dudit citoyen Soufflot, et avons fait transporter le cercueil au cimetière ci-devant Geneviève le plus proche, et avons fait retirer le cercueil de plomb de la caisse en bois, l'avons fait déposer sur deux tréteaux pour être inhumé le plus tôt possible. La caisse en bois a été remise au citoyen Soufflot qui le reconnaît.

« Ont signé : PAROT, SOUFFLOT, DESGRANGES. » [337]



Chapitre XLVI


Marat, l'Ami du Peuple


Chapitre XLVIII


dernière modif : 08 May. 2001, /francais/bougeart/marat47.html